Le féminisme au service de la transformation durable des systèmes agro-alimentaires

Quelle peut être la contribution du féminisme ?
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  • Les lecteurs acquerront une compréhension plus approfondie de la manière dont les idéologies féministes sont perçues, enrichissant leur compréhension des dynamiques de genre dans le développement.
  • Les participants partagent des expériences pratiques pour intégrer les principes féministes dans la transformation des systèmes agroalimentaires. De la navigation des défis en milieu rural à la gestion des dynamiques de pouvoir et des stéréotypes, l’article offre des perspectives précieuses pour les praticiens du développement cherchant des approches efficaces et culturellement sensibles pour promouvoir l’égalité des genres dans le cadre d’initiatives de développement durable.
  • Les lecteurs obtiennent une impression de la manière dont les discussions au sein des groupes de travail sont réellement facilitées.
Photo: © GIZ

La modération de la session « Cultiver le changement – Transformation durable avec les femmes et les groupes marginalisés » s’est concentrée dès le départ sur la compréhension du féminisme par les participant·e·s et sur des exemples de « questions délicates ». La diversité des résultats de cette introspection a alimenté les débats tout au long de la session.

Tenue dans une atmosphère conviviale et avec un ton de conversation détendue, la modératrice et les quatre panélistes ont captivé une audience d’environ quarante personnes, principalement des femmes. Les profils variés des panélistes ont permis un échange interculturel sur le féminisme Nord-Sud, avec un détour sur son appropriation réelle ou empruntée et les défis qui en découlent.

Cet article propose un récapitulatif des moments forts de différentes interventions.

Le féminisme au Sénégal est synonyme de liberté et d’autonomie

Selon Halima Diallo, il n’y a pas de diplomatie féministe ; le cadre féministe demeure la stratégie nationale pour l’égalité et l’équité de genre au Sénégal. Malgré sa propre expérience, Halima avoue avoir été confuse au sujet du féminisme qu’elle défendait, se rendant compte à Paris, lors de la préparation de sa thèse, qu’elle avait adopté un féminisme blanc, bourgeois, beauvoirien qui ne lui correspondait pas du tout. La généralisation des problèmes des femmes occidentales dans un contexte africain différent a davantage compliqué l’appropriation du féminisme.

L’existence femmes cheffes de guerre ou de dynastie, des femmes mythiques et figures d’exception dans l’histoire africaine précoloniale montre que toutes les femmes n’ont pas toujours été dominées. Cependant, cela n’occulte pas le contraste des relations inégales existantes dans le même contexte africain. Le défi est de concilier ces deux réalités ambivalentes. Bien que la démonstration que l’idéologie féministe ait des répondants dans les sociétés africaines minimise le rejet, l’analyse des dynamiques de pouvoir et des privilèges n’est pas passée inaperçue. De nombreux projets de développement sous couvert de l’intégration des questions de genre étaient souvent des projets destinés aux femmes sans aborder véritablement les relations de pouvoir.

Les sociétés sont construites autour de normes et de valeurs

Marame Cissé a souligné que le genre et le féminisme sont liés aux changements de normes et de valeurs autour desquels une société est construite et s’identifie. La déconstruction visée n’est pas seulement sociétale, mais aussi institutionnelle. Les arguments en faveur de cette déconstruction implique le fait que les valeurs féministes ne sont pas en contradiction avec celles de l’Afrique. Malgré la conceptualisation du féminisme en Europe, il n’est pas labellisé occidental. L’évolution de l’histoire a permis d’entendre les voix des féministes du Sud dans les agendas internationaux depuis les années 1970. Les perspectives holistiques du black féminisme ont produit une approche intersectorielle. Toutefois, dans l’analyse des indices d’autonomisation en Afrique, on note peu d’autonomisation absolue : les femmes trouvent des marges de manœuvre telles des espaces de négociation dans les foyers et les communautés.

Magatte Diop a communiqué des informations sur l’accès sécurisé des femmes à la terre, citant les construits sociaux comme source d’inégalité. Au Sénégal, le recours aux prescriptions religieuses – islamiques et chrétiennes – et aux projets de développement a été une alternative réussie, selon Magatte.

Magatte, praticienne en zone rurale, a affirmé qu’il n’y avait pas de solution miracle ; même avec un financement acquis, le succès implique un bon diagnostic et une collaboration étroite avec les cibles. Magatte partage le point de vue de Marame et souligne que le pouvoir n’est pas donné, il faut le prendre intelligemment.

Défier les contrastes pour briser les mythes

Claudia Senghor, jeune entrepreneure agricole, relate les défis rencontrés pour s’imposer sur les réseaux sociaux en tant que consultante agricole. Défiant les contrastes pour briser les mythes, elle encourage les femmes et les jeunes à embrasser les professions agricoles. Claudia travaille à rendre accessibles aux femmes les potentiels non conventionnels des chaînes de valeur agricoles, mettant l’accent sur une combinaison de compréhension du contexte, de stratégie et d’intelligence pour le changement.

En résumé, les intervenantes ont montré que la méfiance à l’égard du féminisme inclut des problèmes tels que la sur-occidentalisation, la volonté d’admettre la pertinence de l’amélioration et l’impact de certaines pratiques de projets de développement. Une matière à réflexion d’un·e participant·e mérite attention au delà de la session : « Comment pouvons-nous promouvoir le féminisme dans les pays partenaires alors que nous, à la GIZ, avons encore beaucoup à faire à notre niveau ? »

Photos:© Corbecoms

Intervenantes en Vedette

  • Coumba Touré est Féministe Panafricaine, Co-coordinatrice du mouvement African Rising, Ecrivaine polyglotte, conteur, coach et conférencière. Cumulant 30 ans d’expérience dans le domaine de la justice sociale, elle utilise la créativité et l’empathie pour agir.
  • Halima Diallo est titulaire d’un doctorat de psychologie à l’Université Sorbonne Paris Nord.et membre du Conseil Consultatif de l’Egalité de Genre (GEAC) du G7
  • Marame Cissé est responsable des questions de Genre à l’IPAR (Initiative Prospective Agricole et Rural). Elle est chercheure associée au GESTES (Groupe d’études et de recherches en genre et sociétés) de l’Université Gaston Berger et enseigne à l’Université numérique Cheikh Hamidou Kane.
  • Magatte Diop est Agricultrice, Productrice de Bio intrants et des bioprotecteurs, Secrétaire Générale de la Fédération Nationale pour l’Agriculture Biologique (FENAB), membre du Conseil d’Administration du Comité National de Concertation et de Coordination des Ruraux (CA-CNCR)
  • Claudia Senghor est Agroéconomiste spécialisée en développement durable, consultante agricole et entrepreneure

Contact

Alima Viviane M’Boutiki

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